vendredi 22 novembre 2013

Les Garçons et Guillaume, à table ! : Tout sur sa mère



Étant facilement impressionnable, j’avais fini par me laisser convaincre que Les Garçons et Guillaume, à table ! serait sans conteste une des bonnes surprises de cet hiver pourri, ou au moins de cette semaine l’étant tout autant. Il faut voir en effet l’impressionnante collection de superlatifs placardée dans les transports en commun parisien, et pour une fois pas seulement sorti d’obscures feuilles de choux interactives dont personne n’a jamais entendu parler et qui ne sont sans doute mises en services que pour servir d’alibis critiques à de tristes longs métrages en danger de bide absolu. Faute de bonne surprise, j’ai donc au moins appris que Guillaume Gallienne a beaucoup d’amis qui lui veulent du bien, ce qui n’a rien d’inutile dans ce métier.
Étrange et inégal déballage nombriliste, on pourrait logiquement être tenté de dire que Les Garçons et Guillaume, à table ! pêche par un principe simple, celui de vouloir dévoyer l’objet cinématographique pour les besoins d’une très longue séance de psy où le moi éclipse tout le reste. Ce serait tentant mais en réalité injuste, pour la bonne et simple raison qu’une bonne partie des films sortis en salle ne sont au fond que des autobiographies plus ou moins subtilement et élégamment maquillées et que même les moins transparentes d’entre elles peuvent parfois être de vrais moments de cinéma, comme en atteste le récent Un Château en Italie

La sincérité du propos de Guillaume Gallienne, à qui on ne peut d’ailleurs reprocher de ne pas se livrer tout entier, est d’ailleurs évidente et par moments indéniablement touchante. Mais la sincérité ne fait pas tout : une fois le rideau levé sur le clap de début, il faut encore faire un film.

Adaptation de la pièce de théâtre déjà écrite et interprétée par Guillaume Gallienne, Les Garçons et Guillaume, à table ! n’en est malheureusement pas vraiment un.  Se condamnant dès l’ouverture à n’être qu’un film à sketches et fleurant parfois la comédie de boulevard, il n’est certes pas dénué de trouvailles amusantes mais manque cruellement d’une structure dramatique qui lui permettrait de s’éloigner un peu de son cadre d’origine en se donnant un peu d’air. Un travers aussi gênant qu’étonnant puisque Guillaume Gallienne semble avec son histoire personnelle avoir tous les ingrédients pour porter cette ambition mais ne semble jamais en mesure de lier toutes ces scénettes dans un grand tout, autrement que par une voix off d’un autre âge, plus adaptée au genre théâtral qu’au cinéma.

Une faute de goût qui n’est cependant rien à côté de l’attentat fait au septième art que constituent d’aussi fréquentes qu’insupportables intermèdes théâtraux mettant en scène Guillaume Gallienne en plein monologue dans l’obscurité devant un lit blanc lumineux comme un parterre de cierges dans une église.  Une esthétique d’une ringardise à peine croyable qui ne serait pas si grave que cela si elle ne cassait au passage complètement le rythme du film. Tragiquement empêché de décoller par ces interruptions intervenant toujours aux moments clés pour casser toute velléité dramatique, son film ne choisit par là même jamais entre sa veine comique et tragique, une hésitation apparemment douloureuse au vu d’une fin tellement rapide qu’elle paraît avoir été bâclée pour en finir, et qui achève donc à la hache un récit qui ne s’était même pas encore installé. 

Un mélange des genres d’autant plus frustrant que la double interprétation de Guillaume Gallienne est effectivement bluffante, parvenant à ne jamais vraiment faire sombrer dans la farce le choix de jouer sa propre mère, qui apparaissait pourtant sur le papier comme un inquiétant hommage à Ma femme s’appelle Maurice. Un pouvoir quasi magique presqu’aussi puissant que celui avec lequel il fait disparaître tout le reste de son casting, condamné dès le début du film à un simple rôle de figurant. Difficile cela dit de crier à la publicité mensongère de ce côté-là, on était prévenus. 

Pénétré d’un profond besoin de témoignage, Les Garçons et Guillaume, à table ! a finalement le rythme propre à une séance de psychanalyse, entassant les souvenirs douloureux ou cocasses comme tant d’anecdotes détachées les unes des autres et se révélant au fond lui aussi très anecdotique. 

Oui, après Violette, cette chronique fait encore preuve d’une insensibilité pathologique aux souffrances de l’humanité. Je ferais peut-être un film pour raconter tout ça moi aussi, mais je pense plutôt à Nathalie Baye pour jouer ma mère.

Note : 6,5 (Barème notation)

A suivre : La maison à  la tourelle (présentation)

Pour vous faire un avis par vous-même : la bande annonce



Pendant ce temps-là, Nathalie Baye est très emballée par mon futur projet.


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