mardi 3 décembre 2013

Comment j'ai détesté les maths : métaphysique des nombres premiers



Étrange plongée au cœur d’un monde en apparence opaque, Comment j’ai détesté les maths affiche clairement une ambition cinématographique plus que documentaire, qui dessert paradoxalement un propos tantôt passionnant tantôt confus.
L’algorithme très complexe que j'ai employé pour décider d'aller voir ce film

Je ne vais quasiment jamais au cinéma pour voir des documentaires, probablement parce que j’aime autant l’un que les autres mais que ces deux univers me semblent peu complémentaires, le mélange de l’artistique et de l’informatif m’ayant toujours semblé ne profiter ni à l’un ni à l’autre.

Dans sa volonté louable d’utiliser le média du cinéma pour intéresser un public plus large que l’audience d’Arte à deux heures du matin à une réflexion tout à fait originale sur un sujet peu bankable, Olivier Peyon fait donc clairement le choix d’adapter un maximum le format du documentaire au contexte cinématographique. Refusant de se doter d’une voix off pour faciliter le cheminement du spectateur, son film, car c’en est un, préfère ainsi se balader de façon plus chaotique et contemplative au gré d’interviews et de nombreux plans décoratifs certes intéressants visuellement mais pas forcément très utiles à l’exercice. Si ce foisonnement est il est vrai une métaphore intéressante de la nature créative et quasi métaphysique de la discipline mathématique, il fait hélas de l’ensemble une somme de parties plus qu’un tout, un comble pour un documentaire ambitionnant de dévoiler toute la complexité fascinante cachée derrière de banales formules. 

Car il y a réalité trois réflexions dans le documentaire d’Oliver Peyon : une première sur le sens et l’identité même de la discipline, un questionnement sur la façon de l’enseigner et une analyse de son impact réel dans le monde, notamment économique. Alors que chacun d’entre eux aurait pu justifier un documentaire à part entière, Comment j’ai détesté les maths ne choisit jamais vraiment son sujet et préfère passer de l’un à l’autre en multipliant interviews et moments de contemplation, sans autre véritable fil rouge que l’apparition récurrente de certains intervenants.

Très décousue, l’œuvre d’Olivier Peyon gagne au fond en poésie ce qu’elle perd en sens, l’indéniable légèreté et rêverie se détachant de son film ne cachant pas l’absence de réelle démonstration, même succincte. Comme il le montre d’ailleurs avec une conclusion simple mais ouvrant intelligemment à la réflexion, il aurait sans doute gagné à faire le pari de la simplicité plutôt que de l’exhaustivité. Difficile également de ne pas penser, même si ça me coûte de le dire, qu’une voix-off aurait favorisé un récit moins confus même si plus schématique, un défaut gênant pour une fiction mais pas forcément pour un documentaire.

En considérant que rien ne se perd, que rien ne se crée et que tout se transforme, Olivier Peyon empiète en effet sans doute un peu trop sur le territoire de la fiction sans utiliser assez les simples mais appréciables potentialités du genre documentaire, pour lequel il avait pourtant une matière diablement intéressante. Reste toutefois qu’il ne faut pas être trop dur avec une œuvre certes imparfaite et inégale mais souvent passionnante et qui ouvre un vaste espace à une réflexion aussi subtile qu’indispensable, ce qui n’est pas rien.

Note : 7 (Barème notation)

Pour vous faire un avis par vous-même : la bande annonce


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La vérité est ailleurs, Fox Mulder l'avait bien compris

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