jeudi 30 janvier 2014

Tonnerre : de battre mon coeur s'est emballé



Intéressant bien qu’inégal, le premier long métrage de Guillaume Brac a les défauts et les inconvénients d’un film volontairement très dépouillé, tantôt un peu trop anodin tantôt réellement hypnotisant. Un difficile équilibre que Tonnerre sait toutefois progressivement apprivoiser une fois son intrigue définitivement basculée dans le tragique, sans nul doute le point fort de l’ensemble.

On remercie encore Vincent Macaigne et Solène Rigot d'être passés à la galette des rois de SLETO

Tourné à Tonnerre et dans ses environs dans des conditions plus ou moins volontairement proches de l’amateurisme (la plupart des acteurs ne sont pas professionnels à l’exception des 4 personnages principaux), Tonnerre est un film au principe de départ simple : exilé dans la province la plus sordide qui soit en plein hiver, le rocker raté Maxime contemple le vide de sa vie, rencontre une jeune fille sur laquelle reporter sa frustration de ne pas être ce qu’il voudrait être et s’emballe un peu trop.

Sans être follement original, ce précepte peut largement suffire à construire un long métrage cohérent et bien rempli, le thème de la passion amoureuse virant à la folie pure et simple restant l’un des plus sûrs moyens de retenir l’attention d’un spectateur. Tonnerre sait d’ailleurs parfaitement exploiter ce filon par moments, notamment dans une dernière partie tout à fait réussie, la très grande sobriété de la mise en scène de Guillaume Brac et la quasi absence de bande son pendant des séquences entières du film installant habilement une tension uniquement alimentée par les non-dits et les emportements de Vincent Macaigne. Cette peinture froide d’une province aussi silencieuse qu’angoissante où les panoramas sur la nature inanimée sont tout sauf des natures mortes est sans doute en partie rendue possible par la volonté de filmer en 16 millimètres, un choix technique apportant un aspect réaliste quasi-documentaire à l’œuvre de Guillaume Brac, qualité particulièrement bienvenue quand sa machine dramatique se met en place.

On regrettera en revanche peut-être, moi oui en tout cas, que Guillaume Brac ne se soit pas contenté d’explorer cette voie et cherche assez clairement à parfois faire de son film une gentille peinture douce-amère de la vie provinciale pas toujours très fine. L’image d’Epinal des gentils provinciaux frustres mais excentriques est en effet un peu grosse et n’apporte pas grand-chose au film, les pitreries parfois inspirées de Bernard Menez ne suffisant pas à complètement crédibiliser une première partie moins drôle et spirituelle qu’elle voudrait l’être et qui fait un moment craindre le dérapage artistique.

Il faut aussi dire que si la beauté toute sauvage des scènes d’extérieur est à mettre au rayon des réussites du film, il est difficile de dire la même chose des nombreuses scènes en intérieur  auxquelles Guillaume Brac a volontairement voulu donner un côté rétro pas très subtil (je n’invente pas, c’est vraiment le cas). Ce choix peut-être défendable artistiquement (il voulait apparemment ainsi souligner le fait que le présent appartienne déjà au passé, et l’amour avec donc …) accouche malheureusement de séquences d’une laideur visuelle assez incompréhensible où décors et visages sont plongés dans une lumière jaunie faisant plus penser à un mauvais film policier des années 60 qu’à un pari visuel.

Cette étrange esthétique et un hésitant comique burlesque, alliés à des performances d’acteurs disons discutables de certains des copains amateurs de Guillaume Brac, restent heureusement surtout circonscrits à la première partie et s’effacent peu à peu quand Vincent Macaigne se trouve rattrapé par la tragédie, inscrivant le film dans un registre dramatique intelligemment manié.

Si une fin un peu moins vague et bâclée aurait sans doute encore ajouté au crédit d’un premier long métrage globalement bien mené, on ne peut cela dit pas enlever à Tonnerre d’avoir l’audace d’explorer jusqu’au bout une certaine esthétique dépressive, et d’en faire un vrai moment de cinéma et pas seulement une contemplation du vide à peine maquillée comme c’est parfois le cas de projets similaires. Il y a ainsi véritablement un petit quelque chose de fascinant dans la patte de Guillaume Brac même si l’on ne met pas complètement le doigt sur ce que c’est. À suivre donc dans les années à venir.


Note : 7,5 (Barème de notation)

Pour vous faire votre avis par vous-même : la bande annonce



A suivre :  Beaucoup de bruit pour rien

C'était vraiment adorable de la part de Vincent Macaigne de venir nous chercher à la gare avant l'avant-première

mercredi 29 janvier 2014

Cette semaine sur mes écrans : 29 janvier - 4 février

Je n'ai pas de phrase d'accroche cette semaine. Passons donc directement aux films.

"Ça ne va pas du tout, ça n'est pas la bouteille que je voulais pour ce rôle"

Beaucoup de bruit pour rien
Comédie dramatique - US (1h48)
Réalisé par Joss Whedon
Avec Alexis Denisof, Amy Acker, Clark Gregg
Entre deux Avengers, personne n'attendait vraiment de Joss Whedon qu'il se lance dans le drame shakespearien. C'est pourtant le pari du créateur de Buffy contre les Vampires, qui adapte ici une pièce comique du plus célèbre dramaturge de tous les temps avec Beaucoup de bruit pour rien (Much Ado About Nothing en VO). Un projet étonnant et apparemment réussi au vu de la bande-annonce, le choix du noir et blanc ne semblant pas altérer la modernité de l'ensemble, qui pourrait être une des premières belles surprises de l'année. Avec dans les deux rôles principaux des acteurs popularisés dans ses deux séries TV vedettes : Alexis Denisof de Buffy (accessoirement le mari d'Alyson Hannigan de Buffy et How I Met Your Mother) et Amy Acker de Angel.


Tonnerre
Comédie dramatique - US (1h40)
Réalisé par Guillaume Brac
Avec Vincent Macaigne, Solène Rigot, Bernard Ménez
Vincent Macaigne est sans aucun doute la star du moment du "cinéma indépendant" français, si tant est que ça veuille dire quelque chose, et le prouve en étant encore à l'affiche d'un film prometteur après être apparu successivement ces derniers mois dans La fille du 14 juillet, La bataille de Solférino et 2 automnes, 3 hivers, trois succès critiques. Il retrouve ici Guillaume Brac qu'il l'avait déjà dirigé dans son précédent film (Un monde sans femmes) et le rôle du loser attachant qu'il va probablement endosser pendant un paquet d'années. On ne sait pas trop quoi faire de la présence de Bernard Ménez à l'affiche mais le drame annoncé dans la bande-annonce suffit à donner envie de tenter le coup.


Jacky au royaume des filles
Comédie - France (1h30)
Réalisé par Riad Sattouf
Avec Vincent Lacoste, Charlotte Gainsbourg, Didier Bourdon, Anémone
Après Les Beaux Gosses (2209), Riad Sattouf revient avec Vincent Lacoste et l'amusante idée de nous emmener dans un monde dominé par les femmes où les hommes sont condamnés à faire profil et à se retrancher derrière des voiles. Reste à voir si son film vaut quelque chose en dehors de cette idée de départ, certes originale mais qui ne suffit pas forcément à combler 90 minutes. Avant le prochain retour des Trois Frères, c'est par ailleurs l'occasion de vérifier si le potentiel comique de Didier Bourdon est encore en vie, et de voir Charlotte Gainsbourg dans une comédie et dans un rôle où elle n'est pas d'une façon ou d'une autre possédée par le diable, ce qui n'est pas si fréquent.


Dallas Buyers Club
Drame - US (1h57)
Réalisé par Jean-Marc Vallée
Avec Matthew McConaughey, Jared Leto, Jennifer Garner
Après nous avoir expliqué pendant 10 ans que Matthew McConaughey était un moins que rien, voilà que Hollywood a décidé depuis le Mud de Jeff Nichols de nous expliquer qu'il a changé et que c'est maintenant le plus grand génie que la Terre ait porté. La belle histoire de la rédemption, un grand classique. Voici donc à peu près tout le pitch de Dallas Buyers Club, tout entier construit autour du nouveau Matthew McConaughey qui peut y traîner son accent du Sud et sa fausse nonchalance à volonté. Je ne vois pas bien ce qui diffère ici du drame hollywoodien de base mais sait-on jamais.


Voilà, c'est tout pour cette semaine.

C'est vrai qu'ils avaient un vrai problème d'acné mais ça n'était peut-être pas la peine non plus d'en arriver jusque là

mardi 28 janvier 2014

12 Years a Slave : douze ans de solitude



Après le Lincoln de Steven Spielberg, Steve McQueen nous entraîne à son tour dans une ambitieuse fresque historique sur les dessous du rêve américain et de l’esclavage. Tout aussi maitrisé formellement, 12  Years a Slave est pourtant d’une force toute autre, porté par un réalisme et une intransigeance artistique étourdissantes, donnant à son œuvre une vérité et une modernité qui fera date. Le premier très grand film de l’année.



Tout comme le récent hommage de Steven Spielberg à Abraham Lincoln, 12 Years a Slave a la force des très grandes fresques historiques américaines, certes parfois un brin mélodramatiques mais servies par des réalisateurs et interprètes au sommet de leur art sachant généralement éviter toute faute de goût. Admirablement bien mise en scène et interprétée, l’œuvre de Steve McQueen est la preuve qu’Hollywood sait encore faire de très grands films, même sur des sujets comme l’esclavage si difficiles à traiter avec intelligence et audace.

Contrairement à Lincoln, épatant formellement mais un peu trop occupé à faire d’Abraham le Messie revenu sur Terre pour guider l’Amérique, 12 Years a Slave est un film tout aussi maitrisé mais d’une autre force car porté dès les premiers instants par un réalisme et une vitalité saisissants. Si l’on savait déjà depuis Hunger et Shame que Steve McQueen n’avait pas peur de montrer la souffrance et la colère des âmes et des corps, 12 Years a Slave montre avec éclats qu’il n’a rien perdu de cette capacité à montrer l’inmontrable sans tomber dans le voyeurisme ou la pure provocation.

Mais tout comme ses deux précédentes œuvres, 12 Years a Slave a aussi l’immense qualité de n’être pas que réaliste et de savoir instiller une touche de lyrisme dans ce tableau pourtant lugubre. Un pari une nouvelle fois réussi à l’aide d’une d’un mise en scène experte, capable d’alterner avec le même talent des moments d’une dureté parfois à la limite du supportable et de courts instants de grâce, les jeux de lumière et de musique fonctionnant à la perfection pour équilibrer le tout. Tantôt lourd et étouffant, tantôt lumineux, 12 Years a Slave sait ainsi se mettre complètement au service de la terrible histoire vraie dont il s’inspire, évitant toute digression stylistique ou philosophique douteuse.

L’intelligence de Steve McQueen est d’ailleurs aussi de conter l’histoire d’un homme sans jamais tomber dans la glorification de l’individu et la mythologie du martyr. Il n’y a en effet pas de grands Satans et de grands prophètes dans 12 Years a Slave, juste des tortionnaires terriblement ordinaires et des victimes n’ayant pas le luxe de faire dans l’héroïsme.

Cette exigence de vérité est au final sans doute la caractéristique principale du cinéma de Steve McQueen, se manifestant sur plusieurs plans. Elle est d’abord le fait d’acteurs irréprochables, l’habitué Michael Fassbender ayant déjà accompagné Steve McQueen dans ses deux précédents films livrant à nouveau une partition époustouflante aux côtés du pour l’instant moins référencé Chiwetel Ejiofor, tout aussi bluffant. A commencer par Paul Dano, aussi hypnotisant dans son rôle de psychopathe minable qu’il l’était dans There Will Be Blood, le reste du casting de Steve McQueen sait également en faire assez sans jamais en faire trop, ce qui suffit largement compte tenu des événements racontés ici.

Cette vérité se manifeste aussi dans quelques scènes proprement hallucinantes où la tension se fait littéralement oppressante, produisant une angoisse peut-être encore plus traumatisante que la violence presqu’insoutenable s’exprimant à quelques moments de manière très crue. Il n’existe malheureusement pas de prix dans le milieu pour récompenser une scène particulièrement réussie ; c’est un tort car la scène où Steve McQueen nous montre pendant un temps très long son héros en train de se débattre la corde au cou en attendant la délivrance est probablement la chose la plus dingue que vous verrez au cinéma cette année, pour de vrai. 

Dans ces quelques instants d’une vérité absolue, il semble alors que tout s’évanouit autour de nous pour nous laisser seuls face au cinéma à l’état plus pur, simple lunette grossissante braqué sur l’esprit humain. C’est tout le génie de Steve McQueen, parvenant à abolir pendant deux heures la frontière entre réalité et cinéma pour livrer une œuvre totale se jouant des deux, alors même qu’elle les contient tous deux entièrement. Il y a de la magie là-dedans, tout simplement.

Celui-là les aura mérité ses Oscars. 


Pour vous faire votre avis par vous-même : la bande annonce


A suivre : Tonnerre




lundi 27 janvier 2014

Sondage de la semaine : attendez-vous le retour des Trois Frères ?

Belle performance pour notre dernier sondage en date puisque avec 9 votes la participation a progressé de plus de 28% la semaine dernière, confirmant ainsi la réussite totale de cette nouvelle rubrique, dont la création a comme vous le savez largement été reprise ici et là dans les médias nationaux.
Ça n'est pas très glorieux de se moquer de ses adversaires malheureuses, mais bravo quand même.

Compte tenu de ce triomphe populaire, un certain nombre d'entreprises du CAC 40 et d'ailleurs m'ont évidemment vite approché pour proposer de sponsoriser le dispositif, flairant l'opportunité de décupler leur image de marque auprès du public cinéphile. Soucieux toutefois de ne pas trahir l'esprit pionnier de Salles lumineuses et toiles obscures, je suis aujourd'hui fier de vous annoncer que nos sondages seront à partir de maintenant sponsorisées par la société Gerblé, leader sur le marché du gluten, du soja et des barres diététiques. Un beau partenariat, qui devrait permettre à nos deux sociétés de prospérer tout en contribuant toujours plus au bonheur de l'humanité, ce qui reste bien évidemment notre but premier.

Une bonne nouvelle dont je me félicite, ne serait-ce que parce qu'il faut bien que quelqu'un le fasse car je le mérite amplement au vu de tout ce que je vous apporte.

Mais commençons d'abord par les résultats du sondage SLETO / Gerblé de la semaine dernière.
 
Avec 2 votes en sa faveur soit une majorité relative de 22% des suffrages, Adèle Exarchopoulos est celle que vous avez choisi pour interpréter votre héroïne préférée dans la prochaine production Buffy contre les Vampires : il faut tuer Robert Pattinson, que je suis actuellement en train de monter avec quelques unes des plus grosses pointures d'Hollywood, dont l'assistant cadreur de Sauvez Willy. Belle consécration pour une actrice dont la carrière n'a jusque là pas vraiment décollé et à qui SLETO donne donc l'occasion d'interpréter un rôle plein de subtilités qui devrait lui permettre de révéler complètement ses talents d'actrice, ou pas si elle n'en a pas. Avec 0 votes, Kristen Stewart, Emma Watson et Megan Fox se voient elles signifier par le public bien avisé de SLETO qu'elles ne méritent pas de camper notre chasseuse de vampires préférée, et c'est bien fait pour elles car elles n'ont répondu à aucun de mes appels alors que je cherche actuellement toujours des candidates pour jouer Willow et Cordelia. Il y a donc une justice ici-bas.

Ceci étant dit, passons maintenant au sondage de cette semaine.

La direction de Gerblé m'ayant suggéré de me recentrer sur des sujets propres à rallier un public le plus large possible, ce que j'ai bien sûr approuvé sans la moindre hésitation, le sondage de cette semaine portera donc sur une des sorties les plus attendues de février : Les Trois Frères, le retour.

Oui, Salles et lumineuses et toiles obscures n'a plus peur de contenter les masses.

Étant moi-même un peu perplexe par cette très tardive suite, surtout au vu de la bande-annonce, j'aimerais connaître votre état d'esprit deux semaines avant que les trois énergumènes débarquent dans toutes les salles de France. En plus  d'être conseillé par votre médecin car il fait monter votre taux de globules rouges dans le sang, votre vote au sondage SLETO / Gerblé de la semaine permettra également à la société de production du film d'ajuster son plan marketing, hésitant encore entre une sortie dans 500 salles et une distribution confidentielle dans 2 salles du 5ème arrondissement, un mercredi sur deux. Une opération gagnant / gagnant donc.

C'est à vous maintenant.

Non, les résultats du sondage ne sont pas disponibles dans la presse de ce matin, il va falloir attendre une semaine comme tout le monde les gars.

vendredi 24 janvier 2014

Le Vent se lève : pourtant, que la montagne est belle ...



Testament d’une carrière désormais derrière lui, Le Vent se lève d’Hayao Miyazaki est un film à  la virtuosité esthétique constante mais à l’intérêt étrangement plus inégal, du moins lorsque l’on n’est pas spécialement amateur de film d’animation comme c’est mon cas. Un travers qui n’empêche cela dit pas l’œuvre d’Hayao Miyazaki de se clore superbement, rachetant ainsi en grande partie deux heures pas toujours inoubliables. 


Peu coutumier des films d’animation, appellation selon moi uniquement créée pour permettre à des adultes d’aller voir des dessins animés sans se sentir ridicules, j’ai longtemps eu peur que Le Vent se lève m’indiffère à peu près autant qu’un banal Walt Disney, loin du chef d’œuvre promis par maintes critiques pleurant la retraite de leur idole.

D’une beauté visuelle indéniable et très joliment ponctué par un thème musical splendide, qui m’avait à lui seul convaincu de me rendre en salle grâce à la bande annonce, Le Vent se lève m’a ainsi longtemps paru être un dessin animé certes fichtrement bien foutu mais pas beaucoup plus intéressant qu’un dessin animé justement. Gentillet mais bien caricatural voire simplet pendant une grosse heure, Le Vent se lève me semblait alors être à des années lumières du petit bijou de sensibilité auquel je m’attendais plus ou moins, le peu de profondeur psychologique de l’ensemble rendant difficile toute véritable émotion.

Ou alors j’étais donc un monstre froid, incapable du moindre sentiment ou de la plus microscopique compassion. Soit, il en était donc déjà fini de ma récente bonne résolution de m’ouvrir à l’inconnu et de laisser mon cœur être pénétré de toute la beauté du monde. Il faut parfois se résoudre à être ce que l’on est, et pas plus.

Au bout d’une heure et demie d’un relatif ennui entrecoupé de quelques sourires et de quelques petits frissons provoqués par la magnifique rengaine musicale ponctuant chaque moment clé de la romance des deux jeunes héros du film je me retrouvais donc face à une triste réalité : les films d’animation ne sont pas pour moi, et me voilà bien emmerdé pour écrire une chronique avec ça.

Et soudain, alors que je n’attendais à peu près plus rien de ce moment très anodin, Hayao Miyazaki sembla se souvenir qu’il avait assez pris son temps et qu’il était temps de mettre enfin sa virtuosité au service d’une noble cause pour clôturer en beauté une des œuvres les plus remarquables du cinéma contemporain.

Le miracle advint alors. Convoquant la touche dramatique et surtout humaine qui manquait jusque-là cruellement à son film, Hayao Miyazaki fait en effet du final du Vent se lève un vrai moment de poésie, d’une tristesse bouleversante de simplicité et de beauté, toute en pudeur. Jusqu’ici relativement vaine, la splendeur de ses images éclate alors complètement au grand jour et permet toujours à l’aide d’une atmosphère musicale d’une élégance rare de donner au Vent se lève toute la profondeur auquel il semblait aspirer dès ses débuts, avec la fameuse citation en français dans le texte de la phrase de Paul Valéry « Le vent se lève ! … il faut tenter de vivre ! ».

Longtemps un peu risible, cette ambition philosophique prend ainsi tout son sens dans des derniers instants où toutes les pièces du puzzle se mettent en place pour donner à ce final des allures d’épitaphe artistique et philosophique pour Hayao Miyazaki. Libérée de la trivialité enfantine qui l’a longtemps entravé, cette belle histoire d’amour et d’obsession des cieux révèle enfin sa singulière beauté et son humaine complexité, permettant au vieux maître de clore son œuvre sur une note de poésie déchirante d’émotion, d’une de ces poésies sur lesquels il est difficile de mettre des mots tant elle semble appartenir à un bien lointain ailleurs. Et le tour est finalement joué. C'était le dernier.

Fin.



Note : 8 (Barème de notation)

Pour vous faire votre avis par vous-même : la bande annonce





A suivre : 12 Years A Slave

mercredi 22 janvier 2014

Cette semaine sur mes écrans : 22-28 janvier 2014

Encore un nombre étonnant de films qui ne m'intéressent pas cette semaine mais contrairement à la semaine dernière ce n'est pas notre cinéma national qui en profitera. Il faut dire que vu le niveau affiché la semaine dernière, j'avais bien besoin de faire une pause avec le made in France.

Voilà donc les deux grands vainqueurs.

23 ans après Le Château de ma mère, enfin la suite des aventures de Pagnol. Nul doute que ça fera le bonheur des habitants de Brignoles, Vitrolles ou Orange.
Le vent se lève
Animation - Japon (2h06)
Réalisé par Hayao Miyazaki
Pour des raisons que je n'ai jamais vraiment exploré parce que je n'ai pas que ça à faire de me poser des question existentielles, je ne crois jamais avoir été voir un film d'animation au cinéma depuis que j'ai passé l'âge de sangloter devant la mort de Mufasa dans Le roi Lion. Ça n'est pas pour autant une conviction idéologique profonde et j'avoue donc que la très belle bande-annonce de l'ultime film du maître Hayao Miyasaki m'a donné envie de revenir sur cette position de principe et de m'ouvrir potentiellement à un nouvel univers que j'avais jusque là complètement snobé, à raison ou pas. N'ayant vu aucun des prétendus chefs d’œuvre du bonhomme (Le voyage de Chihiro étant le plus fameux si j'ai bien compris, en même temps je n'avais pas envie de perdre 10 minutes à faire une vraie recherche), je n'ai aucune attente particulière à part de ne pas avoir au bout de 20 minutes une soudaine envie de me racheter un ours en peluche et une trottinette. Belle audace de ma part en tout cas.



12 Years a Slave
Drame - US (2h13)
Réalisé par Steve McQueen
Avec Chiwetel Ejiofor, Michael Fassbender, Benedict Cumberbatch, Paul Dano
L'audace a ses limites. Il faudrait en effet vraiment que je sois le plus grand emmerdeur du monde pour pouvoir me permettre de vous dire que je n'ai pas envie d'aller voir le dernier film de Steve McQueen sur l'esclavage, bah oui vous voyez c'est pas trop mon trip ... Je fais certes tout mon possible pour atteindre un jour ce statut, et je ne désespère ça, mais d'ici là le minimum de décence m'habitant encore m'ordonne d'aller voir si 12 Years a Slave est bien le grand film multi-récompensé que l'on annonce ou un autre mélo hollywoodien sans saveur. Oui, j'ai bien employé le mot décence, vous n'avez pas rêvé.



Une semaine qui devrait donc me permettre de m'ouvrir à de nouveaux horizons, ou me donner envie d'arrêter de m'ouvrir à de nouveaux horizons. A compter de la semaine prochaine, ce blog sera peut-être rebaptisé "Salles pourries et toiles à chier", suivez donc tout ça de près.

Bonne(s) séance(s) d'ici là et si vous croisez ce week-end au cinéma un type avec une ceinture d'explosifs attachée au corps il se peut que ce soit moi. N'ayez crainte, il faut bien mourir un jour.

Hé Petit ! Ça te dirait de quitter ton pays pour t'engager dans l'armée italienne et perdre des guerres dans le monde entier ?