samedi 4 janvier 2014

La vie rêvée de Walter Mitty : bons baisers de l'Arctique


Grand fan de Danny Kaye, Ben Stiller tente avec La vie rêvée de Walter Mitty de marcher dans ses pas en adaptant à son tour la nouvelle de James Thurber (1939), déjà transposée à l’écran en 1947 avec son idole. Très poussif mélange de comédie, de roman d’aventure et de conte philosophique, son film le ramène malheureusement à une triste réalité : il ne suffit pas de décréter que l’on veut faire un film sérieux pour qu’il soit bon.
Euh je voudrais pas foutre la merde mais elles arrivent quand les blagues Ben ?

Peut-on faire du bon cinéma avec des bons sentiments ? Cette question, que je n’ai pas inventé puisqu’elle était posée récemment par un magazine à l’évocation du film de Ben Stiller, est bien entendu un peu simpliste mais a le mérite d’ouvrir un vrai débat et surtout le mérite encore plus grand de me permettre de débuter cette chronique de manière solennelle. 

Oui, il me semble tout à fait possible de faire du bon cinéma avec des bons sentiments, et beaucoup l’on déjà fait, je ne vais pas vous faire la liste, ce serait long et fastidieux et je n’ai surtout pas envie de prendre le temps de le faire. Ceci étant, Ben Stiller n’a apparemment lui pas appris la recette.

Si l’on ne peut pas retirer à Ben Stiller la sincérité de son projet, il y a en effet assez de naïvetés cinématographiques et de raccourcis dramatiques dans La vie rêvée de Walter Mitty pour faire l’objet d’un cours en première année d’école de cinéma sur les erreurs à ne pas commettre pour un premier long-métrage. Oui je sais c’est gratuit, je n’ai aucune compétence en la matière justifiant cette attaque minable mais ça n’en est pas moins vrai.

Je n’ai jamais vraiment aimé les mélanges entre la réalité et la fantaisie, l'univers de Tim Burton m’ayant pour cette raison toujours laissé de marbre. Mais j’admets que Tim Burton est un vrai réalisateur et fait de bons films si tant est que l’on aime son univers. Ce n’est malheureusement pas le cas de Ben Stiller. En voulant explorer trois dimensions (comique, fantastique, aventure) pour livrer une vaste et ambitieuse réflexion sur la vie, il se perd en effet complètement en chemin et nous embarque dans un univers aussi confus que terriblement caricatural, et c’est sans doute là que réside le gros du problème.

Vaguement intriguant au début, même si les scènes de rêves éveillés de Walter Mitty m’ont personnellement paru aussi longues et répétitives que sans intérêt, le concept du film de Ben Stiller aurait après tout peut-être pu donner un résultat acceptable, voire même agréable. Le beau-fils préféré de Robert de Niro n’a malheureusement pas encore les épaules pour passer du projet au produit et nous offre pendant deux heures une somme impensable de clichés cinématographiques et de philosophie de supermarché qui ferait presque passer Marc Lévy pour un candidat au prix Goncourt.

Il y a en effet dans Walter Mitty à peu près tous les pénibles clichés que l’on peut généralement attendre d’un premier film : scénario aussi prévisible qu’invraisemblable (ce qui est certes en soi une performance), personnages stéréotypés à l’extrême, dialogues très courts, mélo sentimentaliste mille fois vu, musique à fond pour souligner chaque tournant dramatique (cet effet est appelé dans le jargon « technique des Petits mouchoirs », ne me demandez pas pourquoi), leçon philosophique empruntée à un livre de méditation new-age pour adolescentes, fin plus attendue qu’un épisode de Plus belle la vie, … Bref, un très mauvais remake d'Amélie Poulain, Jean-Pierre Jeunet en moins.

Bon certes Ben Stiller a eu la bonne idée de prendre l’avion et de nous faire visiter l’Islande, qui a l’air d’être un joli pays. Et il semble parfois se souvenir qu’il fut un temps où il aimait à nous faire rire, ce qui évite de tomber trop vite dans un demi-sommeil profond. Mais c’est à peu près tout.

On ne sait sinon pas trop ce qui a pu convaincre Sean Penn d’apporter sa caution personnelle à ce grand déballage de lieux communs, sa rencontre finale avec Walter Mitty étant d’ailleurs à la limite du grotesque, mais espérons qu’il aura récolté assez d’argent avec ce rôle pour nous dispenser d’autres apparitions de ce genre.

Réponse au sujet de la dissertation donc : Ben Stiller ne sait pas (encore) faire du bon cinéma avec des bons sentiments. Souhaitons-lui qu’il apprenne vite.


Pour vous faire votre avis par vous-même : la bande annonce


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