dimanche 30 mars 2014

Les Gazelles : révolution française



10 ans après le début de la furia Apatow aux États-Unis et son cortège des comédies gentiment trashs, et trois ans après le Mes meilleures amies de Kristen Wiig qui se réappropriait un genre d’abord très masculin, Camille Chamoux bouscule une comédie française ne s’étant jusque-là pas vraiment mise au niveau avec son premier film Les Gazelles. Enfin quelque chose de pas trop pourri dans le royaume de France.

Ça devient quand même problématique la mode des grosses lunettes ... Putains de hipsters

Quand l’on connait la capacité du cinéma et de la télévision française à copier sans vergogne tout ce qui vient de l’autre côté de l’Atlantique pour économiser les frais d’écriture de ses films on pouvait s’interroger sur l’absence d’équivalents français au phénomène Apatow, ayant pourtant changé en profondeur la comédie américaine depuis 2005 et le premier film labellisé Judd Apatow (40 ans toujours puceau).

Le cinéma français n’a en effet jusque-là jamais vraiment voulu (ou pu ?) emboîter le pas d’un genre ayant pourtant considérablement rafraichi le genre comique en 10 ans de films pas toujours fins mais souvent drôles, le récent C’est la fin en étant la preuve triomphale (voire mon top 10 de 2013). Alors qu’une deuxième génération, toujours largement parrainée par Judd Apatow, est déjà en marche outre Atlantique avec le déferlement de comédies de filles cassant les codes de la même façon que leurs compères masculins (Kristen Wiig donc, et la très branchée Lena Dunham avec sa série Girls), les producteurs hexagonaux ont eux préféré continuer à produire à la chaîne leurs éternelles et interchangeables comédies de mœurs ne reposant le plus souvent que sur des gros castings et des blagues convenues mille fois vues.

Le seul fait qu’un film comme Les Gazelles sorte aujourd’hui, en dehors de ses propres qualités (j’y reviens tout de suite), est donc en soi une bonne nouvelle, encourageante et rafraichissante : on peut apparemment aussi écrire des comédies de qualité en France, ce n’était donc qu’un choix délibéré de ne pas le faire jusqu’à présent (il y a évidemment quand même de bonnes comédies françaises de temps en temps, je force le trait pour les besoins de mon argumentaire vous l’aurez compris, mais vous voyez ou je veux en venir).

Passons aux faits maintenant. Bien que bâti sur une idée de départ intéressante et la volonté claire de casser les codes classiques de la comédie française à papa, le premier film de Camille Chamoux aurait pourtant pu être raté. La comédie générationnelle de potes, ou d’adulescents si vous préférez, comporte en effet assez de lieux communs en elle-même pour vite tourner au vinaigre, ou plutôt au nanard, si l’on se contente de les agiter sans savoir s’amuser avec (le bancal Dépression et des potes sorti en 2012 en était un triste exemple, entre autres).

Étonnamment pour un premier film, ce n’est jamais vraiment le cas dans Les Gazelles, très bonne surprise de ces premiers jours de printemps 2014. Habilement écrit et très rythmé, le film de Camille Chamoux et Mona Achache se révèle plaisant dès les premières secondes et faiblit peu en route, nous offrant ainsi une heure et demie très enlevée et très souvent drôle, ce qui est quand même le plus important. Cette réussite est bien sûr en grande partie celle de son auteur et interprète principale, Camille Chamoux portant le film sur ses épaules du début à la fin avec une maîtrise impressionnante pour une quasi novice au cinéma. Une carrière à suivre.

Plein d’énergie et parsemant ici et là quelques trouvailles comme les très rapides flashbacks éparpillés pendant le film, Les Gazelles parvient également à ne pas complément rater sa fin, ce qui est pourtant souvent le défaut des œuvres de la fabrique Apatow. Malgré une hésitation un peu maladroite dans les derniers instants, Les Gazelles nous épargne en effet à peu près l’éternel happy end gâchant un peu le plaisir de ce qui l’a précédé, cette intelligence permettant de profiter pleinement du film dans son entier.

Si le long métrage de Camille Chamoux ne révolutionne bien sûr pas grand-chose pour qui connaît ses prédécesseurs anglo-saxons et qu’il reste évidemment très prévisible (mais après tout le comique ne se mesure pas forcément au nombre de retournements dramatiques), Les Gazelles n’en montre pas moins avec un certain brio qu’il est possible de faire des films grand public sans renoncer à une certaine liberté d’écriture, et donc qualité. 

Il serait peut-être temps que d’autres s’en inspirent.


Note : 8 (Barème notation

Pour vous faire votre propre avis : la bande-annonce


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