lundi 18 août 2014

Les Combattants

Comédie dramatique française de Thomas Cailley  - 1h38
Avec Adèle Haenel, Kevin Azaïs

La transition énergétique il va falloir qu'on y mette tous un peu du nôtre

Présentation : Alors qu'il aide son frère à maintenir en vie la petite entreprise familiale après la mort de son père, Arnaud rencontre l'étrange Madeleine, déterminée elle à intégrer l'armée pour sophistiquer ses techniques de survie. C'est le début d'une amitié pas comme les autres.

Les Combattants, c'est la preuve parfaite que le cinéma français aime décidément parfois se compliquer la vie.

Pendant une bonne heure, le premier long-métrage de Thomas Cailley est ainsi indiscutablement un des films de l'année car il a une qualité criante : il est extrêmement drôle. 

Souvent perdu entre la comédie bas de gamme qui fait du pognon et la comédie intellectualisée qui ramasse les bonnes critiques, le cinéma français a pourtant généralement du mal à produire de la comédie tout simple mais de qualité, faire rire pour faire rire étant apparemment toujours une honte au pays de la Nouvelle Vague. 

Le miracle des Combattants est justement là : sans jamais aller chercher vers un humour d'entre-soi où le rire permet de faire étalage de son bagage culturel et social, la comédie de Thomas Cailley réussit à être formidablement drôle sans jamais aller chercher non plus du côté du rire facile, labellisé 5 millions d'entrée. Juste très bien écrit et parfaitement interprété, son film est en effet immédiat tout en étant recherché, d'un loufoque qui semble ne tenir qu'à un fil, une intonation de voix ou un mouvement de caméra, mais fait pourtant mouche à chaque fois. Farce tranquille et sûre de sa force qui se contente de faire rire à chaque fois qu'elle le veut mais pas à chaque fois qu'elle se sent obligée de le faire, le coup d'essai de Thomas Cailley frôle ainsi longtemps le coup de génie avec une certaine nonchalance, ce qui n'enlève rien.

Un coup de génie aussi largement redevable au génie comique absolu d'une Adèle Haenel qu'on n'attendait pourtant pas forcément à ce niveau compte-tenu de son CV pour l'instant presque exclusivement dramatique. Dans un magnifique rôle de Droopy féminine sociopathe et hyperactive à total contre-emploi de sa brillante prestation dans le dernier Téchiné (L'homme qu'on aimait trop), elle crève ainsi l'écran de manière complètement hallucinante à chacune de ses apparitions à l'image, la moindre de ses demi-grimaces ou de ses intonations de voix semblant se transformant systématiquement en quasi-fou rire. L'année 2014 aura sans aucun doute été en grande partie la sienne et il est fort probable que l'on reparle de tout cela aux prochains Césars.

On se prend alors à rêver que Thomas Cailley se contente de jouer avec ce jouet comique tombé du ciel jusqu'à la fin, nous laissant le sublime privilège du profiter de la stupéfiante présence d'Adèle Haenel, pas loin d'être capable de déclencher l'hilarité d'un froncement de sourcil. Hélas, sans que cela gâche quoi que ce soit pendant la plus grande partie du film, on pressent vite que le tragique finira par s'inviter au rendez-vous, Thomas Cailley ayant pris soin de semer dès le début ses petits cailloux dramatiques pour n'avoir ensuite qu'à les ramasser et faire parler la poudre.

Quand Les Combattants bascule dans un drame final beaucoup plus commun, ou en tout cas assez classique dans le paysage français qui produit 50 drames de ce type par mois, on n'est ainsi pas complètement surpris mais tout de même légitimement un peu déçu. Si la volonté de faire de son film une très atypique comédie romantique n'est pas en soi condamnable, c'est un genre qui se respecte, on peut en revanche regretter la maladresse d'un final où Thomas Cailley ne semble plus vraiment savoir s'il veut encore faire rire ou seulement faire réfléchir et émouvoir, empêchant de complètement profiter de la conclusion d'un film qui finit au ralenti après être parti à 200 à l'heure.

Dommage car cela obscurcit un tout petit peu le souvenir d'un film qui reste pourtant, quel que soit son véritable genre, une des productions les plus séduisantes de cette année 2014. En faisant l'effort d'oublier vingt dernières minutes assez laborieuses et en se repassant en boucle la chanson phare de sa bande-son (ici), on finira sans doute par retenir l'essentiel : l'énergie tranquille habitant un film si souvent insolent de facilité comique. Il n'y a plus à espérer que cette réussite en appelle d'autres.

Note : 8,5 (Barème notation)

La bande-annonce


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